Continuez après le saut de page >> J’ai déjà introduit dans des billets précédents la collection de classiques de la littérature de East Press, Manga de Dokuha, ainsi que le second volume de cette série, La Bible (2): Le nouveau testament (oui, je sais, j’ai lu le second volume en premier mais c’est lui qui était disponible en premier). Je serai donc plutôt bref dans mon commentaire.
La Bible (vol. 1): L’Ancien Testament (??????????? / Manga de Dokuha: Ky?yaku Seisho / littéralement “Lisez en manga: L’Ancien Testament de la Bible”) est un manga seinen publié en novembre 2010 par East Press dans la collection Manga de Dokuha. Peu de détails sont connu sur le studio Variety Art Works qui a fait l’adaptation des textes et le dessin de ce manga qui se veut, comme tout les autres volumes de la collection, une sorte de condensé (style Readers’ Digest) de la Bible pour un public japonais qui n’en connait rien. Il ne s’agit pas ici de propagande religieuse mais simplement d’une introduction au texte originale (“un écrit religieux en même temps qu’un trésor d’histoires très variées qui abondent de détails et de savoirs divers” comme le précise le manga en conclusion), qui offre au lecteur un point de départ qui lui permettra ensuite, si il le désir, “d’aller jusqu’au texte d’origine.” [à droite: page 13, Dieu crée Adam et Eve]
En occident, l’histoire de l’Ancien Testament est relativement bien connue (ne serait-ce que par les nombreux films bibliques qui jouent à la télé chaque année à Pâques ou à Noël). Je me permet néanmoins un petit rappel. L’Ancien Testament est composé de nombreux livres (dont le nombre varie selon les différents canons), divisés en quatre grandes parties: le Pentateuque (Genèse, Exode, Lévitique, Nombres et Deutéronome), les livres historiques (Josué, Juges, Ruth, Samuel, Rois, Chroniques, Esdras, Néhémie, Esther, Tobie, Judith, Maccabées), Poésies et Sagesses (Job, Psaumes, Proverbes, Ecclésiaste, Cantique des Cantiques, Sagesse de Salomon, Ecclésiastique), et les prophètes (Isaïe, Jérémie, Lamentations, Baruch, Ezéchiel, Daniel, et les Douze). Ce manga s’attarde surtout sur le Pentateuque (la Genèse et l’Exode) et les livres historiques qui racontent l’histoire du peuple d’Israël depuis son entrée en Terre Promise avec Josué jusqu’à l’exil à Babylon. [à gauche: page 19, Caïn et Abel font des offrandes à Dieu]
Le manga se divise en quinze chapitres. Il s’ouvre avec un prologue (p 5-11) qui explique brièvement ce qu’est l’Ancien Testament (un peu comme je viens de le faire), puis enchaîne avec la Génèse (p. 12-17: la création, Adam & Eve). Il poursuit avec Caïn et Abel (p. 18-25), puis l’arche de Noé (p. 26-41), la tour de Babel (p. 42-47), Abraham (p. 48-64), Sodome et Gomorrhe (p. 65-72), Isaac le sacrifié (p.73-82, où Dieu demande à Abraham de sacrifier son fils [image à droite]), Esaü et Jacob (p. 83-89), Joseph en Egypte (p. 90-113) et termine le récit du Pentateuque avec un très long chapitre sur l’Exode (p. 114-237, où Moïse libère son peuple de l’Egypte, reçoit les Dix Commandements et construit l’Arche d’Alliance). Josué (p. 238-257) lui succède et conquiert les territoires allant de Jéricho à Canaan. Puis aux temps des Juges, Gédéon (p. 258-282) poursuit la conquête de la terre promise. Un dernier gros chapitre, Le temps des Rois (p. 283-374), nous raconte brièvement l’histoire de Saul (qui défend et protège Israel), David (qui y apporte la prospérité) et Salomon (qui rend des jugement juste envers son peuple). Le tout se termine avec un prologue (p. 375-382) qui raconte en quelques pages que par la suite le royaume, affaiblit, fut divisé puis conquit par Babylone. Libéré par la conquête Perse, les israélites reprennent foi en leur Dieu qui leur envoie de nombreux prophètes et, finalement, le Messie.
Pages 194-95: Moïse sépare les eaux de la Mer Rouge pour échapper à l’armée du Pharaon
Toute cette histoire est plutôt violente et très répétitive: Dieu choisit un homme pour diriger son peuple, ce chef fait un bon travail jusqu’à ce qu’il tourne le dos à Dieu en commettant quelque péché, le chef disgracié amène la misère sur son peuple qui est conquit, puis libéré, puis le repentir amène un nouvel âge d’or. On rince et on recommence inlassablement. C’est un peu ennuyeux à lire, quoique c’est pas mauvais de se faire rappeler toute cette vieille histoire. Mais, bon, c’est pas ma période préférée. Par contre, j’ai beaucoup plus apprécié ce volume comparativement au second (le Nouveau Testament), dont j’avais trouvé le dessin plutôt moche, car justement le dessin de celui-ci est plutôt bien (bon, on s’entend, c’est tout de même pas un chef-d’oeuvre). Dans l’ensemble, c’est un manga amusant et didactique qui mérite d’être lu si vous êtes curieux ou désirez rafraîchir vos connaissances bibliques (quoique ça reste au niveau de base, la Bible 101 en quelques sortes, et en super accéléré).
La Bible (vol. 1): L’Ancien Testament, par Variety Art Works (traduction: Anne Mallevay). Toulon, Soleil Manga (Coll. Classiques), septembre 2012. 12,8 x 18,2 x 2,7 cm, 224 pg., 8,99 € / $16.95 Can. ISBN: 978-2-30202-242-3. Lecture dans le sens occidental (de droite à gauche) et recommandé pour jeunes adultes (14+).
“Oh my God! It’s full of kittens!” An alternate version of 2001 Space Odyssey? No: my backyard in the last couple of weeks! Two separate litters of kittens roam in the backyard. I had a scare when, one day, they all disappeared (I was dismayed: who had stolen my kittens?! It was a hard blow to take after the unexpected departure of my beloved Spotty) but they were all back the next day. I don’t know what happened but I was glad to see them back (actually it was to be expected because mothers tend to move their kittens after a while for security reasons, so it could happen again; although the shed is providing them shelter and there’s always food). If they are still around next month I am planning to adopt one of them, whose shown us great interest and affection…
Press review — Lately the news have been dominated by two stories: Apple releasing new products (iPhones 5s and 5c, iOS 7) and lots of discussions on the charter of Quebec values. I could say a lot on this subject, but I’ll try to be brief.
I totally agree on the principle that Quebec society (and particularly its government) should be totally secular. I’ve always said that religion should take place only in your head [not on your head!], your home and your temple. No need to broadcast your beliefs with ostentatious signs (and certainly not blocking the metro entrance or wake me up in the morning to distribute leaflets of religious propaganda!). Unfortunately, the government (PQ) has handled the whole situation quite badly, which has been blown out of proportion by its opponents and gave it the bitter taste of xenophobia (some conspiracy theorists say it was done on purpose: either to distract from their poor economical performance or, even crazier, to drive immigrants out of the province to increase their chance in a future sovereignty referendum). However, it should be done fair and square, equally and evenly. Catholic signs of faith should receive the same treatment. That also means no crucifix in classes or in the parliament, no prayers before council meetings.
Personally, I don’t see the problem. I don’t wear any signs of my belief, so why should other people do? Religion is a private matter. That’s the way it should be done here, so why not adapt to this? It is a question of equality. People want to be treated equally? Then it works both ways. And, in this case, the charter is not attacking their liberty of whatever at all: it only asks people not to wear any religious signs if they work for the government, and only during the working hours! Outside of that they can do whatever they want! Someone on the internet compared this with wearing a uniform at work. Is that too much to ask? Of course, it is a delicate and complex subject. The veil that some muslim women wear: is it a religious or cultural expression (after all the Koran only asks women to be “modest”)? Same situation for the turban wore by the Sikhs: in itself it is not an ostentatious sign as it is only used to contains the long hair that their religion requires them not to cut, ever. We should think carefully about all this. Maybe some exceptions, some compromises, are necessary. Unfortunately, many are using this to further their own agenda. If the debate gets ugly, we should try to put ourselves in the others’ place. The fact that we are debating the subject is quite healthy in itself. I am sure we can find a solution that will be acceptable for all and thus preserve the beautiful cultural diversity of our society.
On a lesser extend there also talks about two upcoming elections: municipal and for my union executive team. As usual, I’ve gathered links about the most interesting news and I am sharing them with you:
L’irrésistible succès du manga algérien (Le Monde) [Baka! Manga = BD japonaise, alors comment un manga algérien peut être possible? Vous voulez probablement dire bande-dessinée algérienne de style manga?]
“Le plus grand respect de l’oeuvre originale a présidé à l’édition de Gen d’Hiroshima, tant dans la première édition qu’en a proposé Vertige Graphic que dans cette édition à format réduit. Ainsi, le sens de lecture japonais a été conservé, afin de garder la conception graphique de l’auteur. Les panneaux ou bandeaux comportant des inscriptions sont restitués tels quels et traduits en note. De même, la forme des bulles originales a été sauvegardée, en dépit des problèmes posés par des bulles verticales dans lesquelles un texte plutôt horizontal doit être inséré. Cette réédition en plus petit format ne nuit nullement à la qualité de l’oeuvre, puisqu’elle se rapproche du format dans lequel Gen a été originellement publié au Japon.”
“Ce premier volume est accompagné de l’introduction qu’Art Spiegelman, le célèbre auteur de Maus, avait rédigée pour la version américaine, qui montre bien l’impact considérable de Gen d’Hiroshima lors de sa première parution en Occident.” [ Texte de l’Avant-propos de l’éditeur ]
Continuez après le saut de page >> Au début d’août, au moment de l’anniversaire du bombardement d’Hiroshima, NHK World a présenté un reportage (dans le cadre de l’émission “Today’s Close-up”) sur Gen d’Hiroshima et son créateur, Keiji Nakazawa (le reportage est disponible dans son intégralité sur Youtube). Cela m’a incité à en lire tout au moins le premier tome (ce que je me promettais depuis longtemps). Il est étrange que ce titre, pourtant considéré comme un classique, n’ait jamais été publié par les grands éditeurs de manga mais par de petits éditeurs ou des éditeurs mainstream qui n’ont pas su en faire la mise en marché proprement — et ce tant en français qu’en anglais. Je possède l’une des premières éditions anglaise du premier tome (New Society Publishing, 1987), mais j’ai préféré en emprunter la version française à la bibliothèque afin de la commenter car je la considère plus intéressante et plus respectueuse de l’original.
Gen d’Hiroshima (?????? / Hadashi no Gen / lit. “Gen aux pieds nus”) voit le jour au Japon lorsque Keiji Nakazawa (qui est déjà un mangaka professionnel depuis 1963) publie Ore wa mita [“Je l’ai vu”, qui sera publiée en anglais par EduComics en janvier 1982], un court récit autobiographique d’une cinquantaine de pages, dans le numéro d’octobre du magazine Monthly Sh?nen Jump. L’histoire est si bien reçu que l’éditeur lui propose d’en faire une série qui sera prépublié en feuilletons dans Weekly Sh?nen Jump (1973-74). Cependant, après avoir été abandonné par Shueisha, son éditeur, c’est Chuokoron-Shinsha qui le publiera en volumes (tank?bon) en 1975 et la prépublication en feuilletons se poursuivra dans divers petits magazines intellos (1975-85, Shimin [Citoyen], Bunka Hy?ron [Critique Culturelle] et Ky?iku Hy?ron [Critique d’Éducation]).
Gen d’Hiroshima a d’abord été traduit en anglais par Project Gen, un groupe d’étudiants pacifistes de Tokyo formé en 1976 (Yukio Aki, Alan Gleason [fondateur du groupe qui fera plus tard, entre autre, des traductions pour Dark Horse, tel que Oh My Goddess!], Ann Gleason, Yuko Kitaura, Katsuhiko Mochizuki, Hiroyo Mori, Masahiro Oshima, Noriko Oshima, Leonard Rifas [fondateur du petit éditeur EduComics], Frederik L. Schodt [auteur d’ouvrages sur les manga et sur Osamu Tezuka, traducteur des romans de Gundam, entre autres], Akiko Sugiura, Toshihide Suzuki). Il est publié pour la première fois en anglais par EduComics (et c’est d’ailleurs le premier manga a avoir été traduit dans une langue européenne [Schodt, Manga! Manga!, p. 238]) mais seulement deux fascicules en format “comics” paraitront (1980-81). Cette publication connait un succès critique fracassant mais cela fut loin d’être une réussite commerciale. EduComics eut un peu plus de succès avec la publication de I Saw It (1982), en y ajoutant de la couleur et des ombrages pour y donner une apparence plus familière au public américain, mais toute la controverse autour du sujet a presque détruit le petit éditeur [Schodt, Dreamland Japan, p. 309]. La publication fut reprise plus tard (1987-88) par New Society Publishing, cette fois en format livre (graphic novel), mais s’arrêta après seulement quatre volumes [Adams, p. 94]. Penguin en publia aussi quelques volumes. L’édition actuelle par Last Gasp (2003-10), qui y ajouta une introduction par Art Spiegelman, est finalement complète (dix volumes, quoique le premier est pour l’instant épuisé).
Pour ce qui est de l’édition française, Gen d’Hiroshima fut d’abord publié par Les Humanoïdes Associés en 1983 (mais seulement un volume de deux-cent pages). Ce fut d’ailleurs le premier manga publié en France. Albin Michel fit également une tentative (un volume titré Mourir pour le Japon) en 1990. C’est finalement Vertige Graphic qui publiera la série au complet (2003-11), à la fois en grand format (17 x 24 cm) et en format poche. Certains tomes de la version poche sont manquants mais on me dit qu’ils seront réimprimés en 2014. Je ne peux malheureusement pas vous donner de lien direct vers le catalogue de Vertige Graphic car leur site est en construction et, pour l’instant, seulement une vingtaine de titres y apparaissent (il en manque encore une bonne centaine, dont Gen d’Hiroshima) mais le site devrait être à jour vers la fin octobre.
Inspiré par Shin Takarajima de Tezuka, Keiji Nakazawa commence à dessiner dès le milieu des années cinquante, vers l’âge de quinze ans. Il déménage à Tokyo en 1961 pour devenir mangaka et se trouve un travail d’assistant. Il publie sa première histoire, Spark 1, dans Sh?nen Gah? en 1963. Il publiera dans d’autres magazines mais sans beaucoup de succès. Ce n’est qu’en 1966, à la mort de sa mère, qu’il revient à Hiroshima et découvre sa vocation. Il est choqué tant par le fait que le US Atomic Bomb Casualty Committee avait réquisitionné le corps de sa mère pour en faire l’autopsie afin d’étudier les effets des radiations [Adams, p. 92], que par la constatation qu’après la crémation il ne restait plus que des cendres de ses os (un effet du césium qui affaiblit la structure osseuse). “Je me sentais comme si ma mère me disait de transmettre au monde entier la vérité sur la bombe” [Gravett, p. 57]. Il confronta donc ses souvenirs et utilisa son travail de mangaka pour décrire l’indicible horreur d’Hiroshima et de ses conséquences.
Nakazawa commence donc à produire des histoires anti-guerres. Il en publiera huit, dont Kuroi ame ni utarete (Sous la pluie noire, 1968), Aru hi totsuzen (Soudain un jour, 80 pages, 1970) et Ore wa mita (Je l’ai vu, 46 pages, 1972). Avec cette dernière, il en vient à un point tournant où, après avoir raconté des histoires de survivants (appelés hibakusha), il nous offre son propre témoignage et décrit comment, à l’âge de six ans, il a survécu au bombardement d’Hiroshima, la perte son père, son frère cadet et de sa soeur dans l’incendie qui suivi, et comment tout cela l’amena à devenir un mangaka anti-guerre [Schodt Manga! Manga! p. 155]. Après avoir écrit des histoires de plus en plus longues, Nakazawa s’attaque maintenant à une série. Avec Hadashi no Gen (1973-85) il reprend sa propre histoire mais en se concentrant seulement sur son enfance. Il modifie le récit, l’étend considérablement (totalisant près de deux mille pages!) et change les noms [Adams p. 90]. Keiji devient alors Gen, qui signifit “racine”. Nakazawa espère ainsi que son récit fera germer chez ses lecteurs une compréhension de la guerre et de ses atrocités, les inspirant à travailler pour la paix. Le manga engendrera également trois long-métrages, un film d’animation et même un opéra.
L’histoire du premier volume de Gen d’Hiroshima est entièrement consacrée à décrire les conditions de vie quotidienne de la population japonaise durant les dernier moments de la guerre: le rationnement et la pénurie de nourriture, la pauvreté et la misère, les entrainements quotidiens (et futile) avec des lances de bambou, la constante propagande et répression militaire, la cruauté des entrainements militaires, le mépris pour la vie des jeunes soldats et l’entêtement dans une guerre sans espoir [Schodt Manga! Manga! p. 75; Thompson p. 21]. La souffrance de la famille de Gen est d’autant plus grande que le père est un artiste ouvertement pacifiste qui s’insurge contre le privilège des riches, l’injustice faite aux coréens et critique le militarisme excessif, ce qui, en temps de guerre, équivaut à la trahison. Ils seront donc ostracisés et persécutés tant par leur voisins que par la police [Schodt Manga! Manga! p. 238]. Je ne doute pas de la véracité de ces dures conditions car ma femme m’a raconté que la famille de son père (heureusement trop jeune pour être conscrit) devait cultiver du riz pour les soldats mais ne pouvait en manger car la population n’avait droit qu’aux patates!
Les volumes subséquents traitent surtout de la souffrance des hibakusha. Les “chanceux” qui ont survécu à l’explosion et aux radiations doivent maintenant faire face à la famine, au désordre social (incluant la monté du crime organisé et les marchés noirs qui en découlent), à l’indifférence de l’occupant américain et, surtout, à la discrimination que leur condition de “contaminés” leur fera subir pour le reste de leur existence [Schodt Manga! Manga! p. 238]. Par la suite, dans l’espoir sans doute d’accroitre la popularité de son oeuvre, Nakazawa consacre un peu plus de temps aux gamineries espiègles des jeunes survivants désoeuvrés. Malgré cela, la représentation réaliste et parfois trop “graphique” de la dureté des conditions des survivants et des effets de la bombe [Schodt Manga! Manga! p. 238], de même que la critique qu’il fait tant du militarisme japonais que des comportements de l’occupant lui vaudront des objections sérieuses venant des deux côtés du Pacifique [Adams p. 92], ce qui nuira beaucoup à la diffusion de son oeuvre. La controverse se poursuit même de nos jours, alors qu’une commission scolaire du sud-ouest du Japon a décidé de retirer le manga des bibliothèques de ses écoles primaires et secondaires à cause de la représentation de la brutalité commise par les troupes japonaises (certains d’ailleurs nient que ces atrocités aient même eu lieu) [ANN, The Asahi Shimbun].
Gen d’Hiroshima est un drame historique, un manga documentaire, qui nous offre une histoire extrêmement émouvante ainsi qu’un message pacifiste puissant et universel [Schodt Manga! Manga! p. 238; Thompson p. 21]. On y retrouve le même style caricatural que chez les autres mangaka de sa génération (Ishinomori, Mizuki, Tatsumi, Tezuka), simple mais très expressif, “stylisant les émotions les plus dramatiques” [Manga Dico p. 372], mais qui n’est pas apprécié de tous puisque certains qualifient son dessin de “médiocre et empesé” [Groensteen p. 112]. Son style narratif est assez fluide. Malgré le sujet, il ne cherche pas a impressionner mais présente simplement les faits, variant les éléments de l’histoire pour conserver l’attention du lecteur. Il évite la dramatisation outrancière en contre-balancant d’une bonne dose d’humour, certaines scènes de bagarres approchant même le burlesque, et sait faire preuve de techniques narratives plus complexes (comme lorsqu’il marque le temps en représentant régulièrement le soleil–symbole impérial japonais–qui emplit la case).
L’édition anglaise de Last Gasp offre une excellente traduction, une bonne qualité d’impression et de papier mais malheureusement les planches ont été inversées afin de présenter l’histoire dans le sens de lecture occidental (de gauche à droite). Pour cette raison, je préfère l’édition française en format de poche de Vertige Graphic, qui nous présente le manga dans sa forme originale. La traduction, par Koshi Miyoshi et Vincent Zouzoulkovsky, est toute aussi bonne (quoique la qualité du papier et de l’impression laisse un peu à désirer). Un seul bémol cependant: pour une raison étrange l’édition française comporte douze pages de moins en fin de volume (j’espère qu’elles se retrouvent au début du volume suivant!).
Nakazawa a conçu Gen d’Hiroshima comme un manga pour enfant (sh?nen), mais la complexité, le sérieux et la dureté du sujet font qu’il est souvent considéré en occident comme un manga seinen, voir un gekiga. Quoiqu’il en soit c’est une lecture incontournable tant par son importance dans l’histoire du manga, que par la valeur didactique de son message pacifiste. Donc, à lire absolument.
Gen d’Hiroshima, vol. 1 (de 10), par Keiji Nakazawa. Paris, Vertige Graphic, 2007. Format poche (13 x 18 x 2 cm), 275 (+ XIII) pg., 9.00 € / $14.95 Can. ISBN: 978-2-8499-9051-3. Sens de lecture Japonais. Recommandé pour adolescents (14+ à cause du language, l’humour grossier, nudité et violence).
Aussi disponible en version anglaise:
Pour plus d’information vous pouvez consulter les sites suivants:
Pour en savoir plus sur ce titre vous pouvez également consulter les entrés qui lui sont consacrées (en anglais) sur Anime News Network, The Comic Journal (un interview et une nécrologie), Goodreads et Wikipédia. En français, j’ai également trouvé un interview et une biographie bien illustrée.
Autres sources:
ADAMS, Jeff. Documentary Graphic Novels and Social Realism. Bern, Peter Lang (Série “Cultural Interactions: Studies in the Relationship between the Arts, vol. 7”), 2008. 214 pg, ISBN 978-3039113620. [cet ouvrage est disponible en partie sur Google Books; voir particulièrement les pages 90-109]
FINET, Nicolas et al. Dico Manga: Le Dictionnaire encyclopédique de la bande dessinée japonaise. Paris, Fleurus, 2008. 624 pg, ISBN 978-2-2150-7931-6.
GRAVETT, Paul. Manga: Sixty Years of Japanese Comics. New York, Harper Design International, 2004. 176 pg, ISBN 978-1-8566-9391-2.
GROENSTEEN, Thierry. L’Univers des mangas. Tournai, Casterman, 1996. 144 pg, ISBN 978-2-2033-2606-4.
SCHODT, Frederik L. Dreamland Japan: Writings On Modern Manga. Berkeley, Stone Bridge Press, 1996. 360 pg, ISBN 978-1-8806-5623-5.
SCHODT, Frederik L. Manga! Manga! The World of Japanese Comics. Tokyo, Kodansha International, 1983. 260 pg, ISBN 0-87011-752-1.
THOMPSON, Jason. Manga: The Complete Guide. New York, Ballantine Books/Del Rey, 2007. 560 pg, ISBN 978-0-345-48590-8.
Finalement, pourquoi ne pas visionner le reportage de NHK World disponible sur Youtube:
The work of Jir? Taniguchi has been repeatedly recommended to me and I must admit that I was bewitched from my first reading. Its superb, precise and poignant style as well as his concise and clever narrative–which always move forward at a very slow and almost contemplative pace–make him a must-artist and the most zen of all mangaka I know! And it is precisely his detailed craftsmanship and profound stories that closely resembles European comics (of which he acknowledges the influence) and that’s probably why he is much more popular in Europe that America.
The Ice Wanderer [????? / T?do no Tabibito / lit. “the tundra’s traveler”], first published in 2004, is no exception and is a superb example of Taniguchi’s talent. It is a collection of six short stories. The overall general theme of this collection is very Japanese and a very dear subject to the author: the respect and communion with nature. This is particularly evident in the last story, “Return to the Sea”. A man is studying whales in Alaska. Following an accident, the whale known as Old Dick saves his life. In fall, after the start of the great seasonal whales migration, Old Dick stayed behind and, like told in Inuit folklore, returned to his origin in the deep sea abyss. The man follow the whale to witness this “death rite” and almost dies himself. This story was first published in Japan in Big Comic Spirits (March 28th, 1994).
As for the first three stories, they deal more with the confrontation against wilderness and the fight for survival. In “The Ice Wanderer”, two men, who are lost in the Klondike region (Yukon) in 1897, owe their survival only to the providential appearance of an old hunter, who tells them a strange legend (first published in Big Comic Original Extra Edition, on July 2nd, 2003). In “White Wilderness”, two explorers travelling in the Yukon river basin (Alaska) to bury one of their companions, are struggling to survive as they are surrounded by wolves (this is a retelling of the first part of Jack London’s White Fang; first published in Big Comic Original Extra Edition, on December 28th, 2003). In “Our Mountains”, at the beginning of the Showa period (in the 20s) in the Senhoku district (Akita prefecture), a man goes on the trail of the bear that killed his son (first published in Big Comic Special Extra Edition, on December 1st, 2002).
The two remaining stories of the collection are distinguishing themselves by focusing more on another theme very dear to the author: they are touching stories telling every day’s life with a kind of urban nostalgia which sometimes feels autobiographical. In “Kaiyose-Jima” (“The island where the wind brings the seashells“, first published in Big Comic Original Extra Edition, on July 1st, 2004) we already find a more human environment. Following his parents’ divorce and his mother’s illness, the young Takashi spends the summer with his uncle in a small fishing village. With Yae-chan, an orphan taken in by his uncle and who taught him to swim, he gradually forgets the grief caused by his mother’s absence. One day, as they were gathering seashells together, a storm pushed their boat out to sea and they have to spend a terrible night on a small island.
In “Sh?kar?” (first published in Big Comic, January 10th, 1998), the story takes place in a more urban environment. Set in the 45th year of the Showa period (1970), it tells of a young mangaka who is influenced by the atmosphere of his new apartment, located in a former brothel. I do not think these two stories break completely with the theme of nature, because here Taniguchi seems to tell us that we can always communicate with our environment, whether it’s natural or urban.
Excerpts from “Our Mountains”; above: pages 127-28; below: pages 129-30
All in all, although this collection of short stories is a bit uneven, it is nevertheless a very good reading. It is worth noting that the work done by Fanfare (for the editing, translation and notes) and Ponent Mon (for the publishing) is excellent. I particularly appreciate that they respected the original format (reading from right to left) and did not flip the art (which unfortunately seems to happen often in North American editions). This is a high quality book (fine printing, good paper and binding) that everyone should read, as it is perfect to get acquainted with the work of Taniguchi.
The Ice Wanderer and other stories, written & illustrated by Jiro Taniguchi, translation by Elizabeth Tiernan and Shizuka Shimoyama. Rasquera (Tarragona, Spain), Fanfare/Ponent Mon, October 2007. B&W, 5.8 x 8.25 x .75 in, 240 pgs. £11.99 / $21.99 US. ISBN: 978-84-96427-33-4. Original Japanese format (right to left). Recommended for older teens (16+).
Also available in French: L’Homme de la Toundra, par Jir? Taniguchi. Casterman (Coll. Sakka), 2006. B&W, 15 x 21 cm, 248 pgs. 11.50 € / $23.95 Can. ISBN: 9782203373846. Recommandé pour jeunes adultes (16+).
For more information you can check the following sites:
To know more about this title you can also check articles on about.com and Anime News Network.
I was recently reminded of the existence of this collection because one of its titles, The Future Is Japanese, is featuring a short story that just won the 2013 Hugo Award for Best Short Story at LoneStarCon 3, in San Antonio, Texas. The short story is “Mono no Aware” by Chinese-American science fiction writer Ken Liu. It “tells the tale of the last Japanese survivor aboard an American space habitat after an asteroid has destroyed the Earth. This is the second story for which Ken Liu has won a Hugo Award”.
The Future Is Japanese, “edited by Nick Mamatas and Masumi Washington, is an anthology collecting science fiction from, and about, Japan, by some of the world’s best genre writers” (Pat Cadigan, Toh EnJoe, Project Itoh, Hideyuki Kikuchi, Ken Liu, David Moles, Issui Ogawa, Felicity Savage, Ekaterina Sedia, Bruce Sterling, Rachel Swirsky, TOBI Hirotaka, Catherynne M. Valente). Published in May 2012, it is available from most major North American book retailers (and an eBook edition is also available for the Amazon Kindle, Apple’s iBooks Store, the Barnes & Noble’s Nook Books Store, and the Sony Reader™ Store).
The Future Is Japanese. San Francisco, Haikasoru, 2012. 365 pages, 5 1/4 x 8 in., $14.99 USA / $17.99 CAN / £9.99 UK (iTunes & Kindle eBook: $8.99 USA), ISBN: 978-1-4215-4223-2.
In fact, Fanfare/Ponent Mon is not really one publisher but two small publishers, from United Kingdom and Spain, working together “to bring quality storytelling in the comic medium”. So small that Fanfare is actually a one-person company, where Stephen Robson is owner, publisher, and editor (see his interview on Manga Worth Reading)! According to their website, they focused at the beginning mostly “on the French and Japanese alternative scene through Frédéric Boilet´s “Nouvelle Manga” movement” but are now widening their interest, although always selecting and publishing the best original works they can find.
This selection represents indeed the best of Taniguchi. Their latest release is the fourth volume in the superb Summit of the Gods manga series (£14.99 / $25.00 US, ISBN 9788492444632).
So far, I’ve talked and commented mostly on the french edition of Taniguchi’s manga, but I also want to comment on the english books and I will–as soon as I get my hands on more of them (I have already a few of them but I’d like to have more than one volume of a series in order to have a better idea of the story before commenting on it).
“If you are cold, tea will warm you; if you are too heated, it will cool you; If you are depressed, it will cheer you; If you are excited, it will calm you.” ― William Ewart Gladstone