Les Constantiniens (1)

Constantinus (310-337 EC) (2)

Comme je l’ai mentionné la semaine dernière, à partir d’octobre 312 il ne reste plus que deux co-empereurs: Licinius en Orient et Constantinus en Occident. Pendant environ quatre ans, ce partage du pouvoir se maintient sans trop d difficultés mais une une méfiance mutuelle croissante mène à l’inévitable conflit. À deux reprises, la guerre civile éclate et les deux co-empereurs s’affrontent. En fait il n’y a grand chose à dire de plus sur ces événements que ce qui a déjà été dit dans mes entrées sur Licinius (partie 1 et partie 2) alors je tenterai d’être bref.

Après sa victoire sur Maxentius à Rome, Constantinus est entré (adventus) dans la cité en triomphe. Il reçoit du sénat le titre de “Plus grand des Augustes”. Dans les années qui suivent, il s’attache à améliorer son image à l’aide d’une importante campagne de propagande et de construction publiques, mais surtout à consolider son armée afin de s’assurer de sa supériorité sur son adversaire. En avril 313, il rencontre Licinius à Mediolanum (Milan) pour consolider leur alliance par le mariage de ce dernier à Constantia, la demi-soeur de Constantinus. Ils proclament conjointement l’Édit de Milan qui accorde la liberté de culte à toute religion (y compris le christianisme). Toutefois, Licinius doit retourner précipitamment en Orient car il reçoit la nouvelle que Maximinus Daza a capturé Byzance et fait le siège de Héraclée. Licinius le rejoint à Andrinople et le vainc à la bataille de Tzirallum. 

Il ne faudra que deux ans pour que cette alliance se désagrège alors que Constantinus accuse Licinius d’être derrière une tentative d’assassinat. Les armées des deux Augustes s’affrontent d’abord à la bataille de Cibalae en octobre 316, où Constantinus met Licinius en déroute, puis à nouveau en décembre à la bataille de Mardia. Faute de victoire décisive on se résout à négocier en janvier 317 et parvient à un accord en mars où Licinius doit concéder la Pannonie et la Macédoine. En échange, le fils de Licinius (Licinius II) est fait César conjointement avec ceux de Constantinus (Crispus et Constantinus II). La paix revient sur l’Empire pour un autre six ans. Pendant ce temps, Constantinus s’est établit à Sirmium (en Pannonie) pour défendre la frontière du Danube contre les Goths et les Sarmates (en 322-323).

Dès 320, la rumeur que Licinius ait répudié l’Édit de Milan et soit retourné à des pratiques païennes crée des tensions entre les Augustes qui culminent en un nouveau conflit. C’est un affront à Constantinus qui s’est érigé en défenseur du christianisme. Un incident frontalier en 323, servira de prétexte au conflit qui se déclinera en une série d’affrontements: la bataille d’Andrinople en juillet 324, puis les batailles navales de l’Hellespont et finalement la bataille de Chrysopolis en septembre 324. Coup sur coup, son infériorité numérique compensée par la ferveur de ses troupes, Constantinus en sort vainqueur. À Nicomédie, Licinius se rend car Constantinus a promis à sa demi-soeur qu’il serait épargné. Il est exilé à Thessalonique mais sera néanmoins exécuté quelques mois plus tard. Constantinus est enfin le seul maître de l’Empire. (À suivre…)

Cette semaine je vous présente cinq autres pièces de monnaie de Constantinus qui offrent toutes différents types de “VOT XX” (que j’ai déjà discuté dans la première partie de mon exposé sur Licinius).

IMG_0699-0707La première de ces pièces est un très beau follis réduit (F [Fine], AE [Bronze], 17 x 19 mm, 2.561 g, payé environ $6 le 1985/04/14; die-axis: ↑↑). L’avers nous montre un buste de l’empereur casqué et cuirassé à droite, avec l’inscription latine CONST-ANTINVS AVG[VSTVS]. Le revers illustre un étendard inscrit d’un VOT[IS] XX (sur deux lignes, signifiant Votis Vicennalibus / “Voeux pour le vingtième [anniversaire de règne]” — le texte n’est pas clair sur la photo mais demeure très lisible sous certains angles), planté entre deux captifs assis et ligotés, avec l’inscription latine VIRTVS – EXERCIT[VS] (“la valeur / le courage de l’armée”), avec un S T en exergue (marque de la deuxième officine [S = Secundus] de l’atelier de Ticinium [T]).

Selon le RIC (Bruun P.M., Ed. by Sutherland C.H.V. & Carson R.A.G., The Roman Imperial Coinage vol. VII: Constantine and Licinius (313-337). London: Spink & Son, 1966, p. 356, 376), cette pièce aurait été frappé par la deuxième officine de l’atelier de Ticinium (Pavie) vers 319-320.

Sources: Wikipedia (Constantinus [FR/EN]), Google, FAC (Constantinus, Exercitus, standard, vexillum, Virtus, Virtus Exercit, vota, VOT XX), ERIC (Constantinus); RIC v. 7: 114; CataWiki, CoinArchives, CoinArchives, r5coins, WildWinds (text, image). Voir aussi ma fiche.

IMG_0688-0695La deuxième pièce est un beau follis réduit très similaire au premier (VG [Very Good], AE [Bronze], 18 x 19 mm, 2.623 g, payé environ $6 le 1985/04/14; die-axis: ↑↓). L’avers nous montre un buste de l’empereur casqué et cuirassé à droite, avec l’inscription latine CONSTAN-TINVS AVG[VSTVS]. Le revers illustre un étendard inscrit d’un VOT[IS] XX (sur deux lignes, signifiant Votis Vicennalibus / “Voeux pour le vingtième [anniversaire de règne]”), planté entre deux captifs assis et ligotés, avec l’inscription latine VIRTVS – EXERCIT[VS] (“la valeur / le courage de l’armée”), avec un PLG en exergue (marque de la première officine [P = Primus] de l’atelier de Lugdunum [LG]) et A / S (marque de séquence) dans le champs de part et d’autre.

Selon le RIC (op. cit., v. vii, p. 129), cette pièce aurait été frappé par la première officine de l’atelier de Lugdunum (Lyon) vers 320.

Sources: Wikipedia (Constantinus [FR/EN]), Google, FAC (Constantinus, Exercitus, standard, vexillum, Virtus, Virtus Exercit, vota, VOT XX), ERIC (Constantinus); RIC v. 7: 107; CoinArchives, CoinProject. Voir aussi ma fiche.

IMG_8288-8289La troisième pièce est un très beau follis réduit (F [Fine], AE [Bronze], 19.5 x 20 mm, 2.543 g, payé environ $6 le 1985/04/14; die-axis: ↑↑). L’avers nous montre un buste de l’empereur casqué et cuirassé à droite, avec l’inscription latine CONSTA-NTINVS AVG[VSTVS]. Le revers illustre un autel (Ara ou Cippus) sur lequel repose un globe céleste surmonté de trois étoiles (❋❋❋), engravé VOT-IS-XX (sur trois lignes, signifiant Votis Vicennalibus / “Voeux pour le vingtième [anniversaire de règne]”), avec l’inscription latine BEATA TRAN-QVILLITAS (“Tranquillité bénie ou heureuse”), avec S T R en exergue (marque de la deuxième officine [S = Secundus] de l’atelier de Augusta Treverorum [TR]).

Selon le RIC (op. cit., v. vii, pp. 143, 157-159, 190), cette pièce aurait été frappé par la deuxième officine de l’atelier de Augusta Treverorum (Trèves) vers 321.

Sources: Wikipedia (Constantinus [FR/EN]), Google, FAC (Constantinus, Ara, Beata Tranquillitas, Cippus, vota, VOT XX), ERIC (Constantinus); RIC v. 7: 303; acsearch, CoinArchives, CoinArchives, CoinTalk, WildWinds (S [text, image], var [text, image]). Voir aussi ma fiche.

IMG_0742-0747La quatrième pièce est un très beau follis réduit (F [Fine], AE [Bronze], 18.5 x 19.5 mm, 2.087 g, payé environ $6 le 1985/04/14; die-axis: ↑↑). L’avers nous montre une tête de l’empereur laurée à droite, avec l’inscription latine CONSTAN-TINVS AVG[VSTVS].  Le revers illustre un VOT[IS] •  XX (Votis Vicennalibus = “Voeux pour le vingtième [anniversaire de règne]…”) sur deux ligne au centre d’une couronne de laurier, avec l’inscription latine D[OMINO] N[OSTRI] CONSTANTINI MAX[IMO] AVG[VSTI] (“…de Notre Seigneur Constantinus le Grand Auguste”), avec un R P en exergue (marque de la première officine [P = Primus] de l’atelier de Rome [R]).

Selon le RIC (op. cit., v. vii, pp. 289-290, 320-321), cette pièce aurait été frappé par la première officine de l’atelier de Rome vers 321.

Sources: Wikipedia (Constantinus [FR/EN]), Google, FAC (Constantinus, Dominus, laurel wreath, vota, VOT XX), ERIC (Constantinus);  RIC v. 7: 232 / 237; acsearch, Catawiki, CoinProject, FAC, vcoins,  WildWinds (text, image). Voir aussi ma fiche.

IMG_0751-0755La cinquième pièce est un très très beau follis réduit (VF [Very Fine], AE [Bronze], 18.5 x 19 mm, 3.129 g, payé environ $6 le 1985/04/14; die-axis: ↑↓). L’avers nous montre une tête de l’empereur laurée à droite, avec l’inscription latine CONSTAN-TINVS AVG[VSTVS].  Le revers illustre un VOT[IS] •  XX (Votis Vicennalibus = “Voeux pour le vingtième [anniversaire de règne]…”) sur deux ligne au centre d’une couronne de laurier (décorée d’une étoile dans le haut), avec l’inscription latine D[OMINO] N[OSTRI] CONSTANTINI MAX[IMO] AVG[VSTI] (“…de Notre Seigneur Constantinus le Grand Auguste”), avec un TSEVI en exergue (marque de la cinquième officine [E = Epsilon] de l’atelier de Thessalonique [TS]; “VI” pourrait être une marque de séquence ou une référence au VIe Consulat de Constantinus en 320).

Selon le RIC (op. cit., v. vii, pp. 481, 495-496, 513), cette pièce aurait été frappé par la cinquième officine de l’atelier de Thessalonique vers 324.

Sources: Wikipedia (Constantinus [FR/EN]), Google, FAC (Constantinus, Dominus, laurel wreath, vota, VOT XX), ERIC (Constantinus);  RIC v. 7: 123; acsearch, CGBFR, CoinArchives, CoinProject, CoinTalk, sixbid, vcoins, WildWinds (text, image). Voir aussi ma fiche.

 

Encore une fois, on remarque que les pièces de monnaie présentées ici sont surtout frappées en Occident, puisque durant cette période Constantinus était encore cantonné dans la partie ouest de l’Empire. Les pièces frappées à Rome et à Thessalonique démontrent bien que, depuis sa victoire contre Maxentius en octobre 312, il a reprit le contrôle de la ville éternelle et qu’il a étendu son territoire plus à l’Est (notamment en Macédoine) après sa victoire contre Licinius lors de la première guerre civile en 317.

Aussi, le fait que les trois premières pièces représentent l’empereur avec des attributs beaucoup plus militaires (casqué et cuirassé au lieu d’être simplement lauré ou radié et drapé) est sans doute une référence soit à sa victoire contre Licinius quelques années auparavant, soit aux tensions renouvelées qui l’obligent à se maintenir sur le pied de guerre. Ce sont également des pièces qui flattent l’égo des troupes en ventant leur mérite (Virtus Exercitus) ou qui promettent la paix (Beata Tranquillitas).

Il est intéressant de pouvoir comparer des exemplaires d’un type de revers frappé à deux ateliers différents, comme pour le type avec un étendard entouré de captifs frappé à Ticinium et à Lugdunum. C’est le cas aussi pour les deux dernières pièces qui sont deux exemplaires du même type de “VOT XX” dans une couronne frappé à  Rome et à Thessalonique. Ce type représente le pendant pour Constantinus des deux “VOT XX” dans une couronne que je vous ai présenté dans la deuxième partie de mon entrée sur Licinius. Car les types de revers n’étaient pas seulement partagés par plusieurs ateliers mais aussi par les différents Augustes et Césars, afin de maintenir une uniformité dans la monnaie. Finalement, nous remarquons que le titre de “Constantin Le Grand” (Constantinus Maximus), que l’on retrouve souvent dans les sources, prend également son origine à cette époque. 

La semaine prochaine nous concluons le règne de Constantinus et nous pencherons sur ses accomplissements avec trois autres pièces de monnaie.

Voir l’index des articles de cette chronique.

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Monnaies anciennes 57

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