Les Constantiniens (4)
Constans (333-350) (2)
Flavius Julius Constans (généralement appelé Constant 1er) ayant vaincu son frère Constantinus II en 340, contrôle maintenant toute la partie occidentale de l’empire alors que son frère Constantius II règne sur la partie orientale. Ce partage du pouvoir se fera sans trop de difficultés, chacun des co-empereurs étant occupé à maintenir l’intégrité de ses frontières: contre les tribus germaniques à l’Ouest et contre les Perses Sassanides en Orient. En 348, Constans célébrera à Rome le onzième centenaire de la cité avec des jeux séculaires. Le principal point de dissension sera au niveau des politiques religieuses divergentes des deux empereurs.
Constans s’élève en grand défenseur du christianisme orthodoxe et s’en tient au credo établit lors du concile de Nicée en 325. Ainsi il lutte tout autant contre les pratiques païennes (en interdisant les sacrifices, la magie et en faisant fermer des temples) que contre les schismes chrétiens que sont le donatisme et l’arianisme. Il supportera les nicéens où qu’ils soient, même en Orient, où son frère Constantius II favorise l’arianisme. Ils s’opposent sur la nomination de l’évêque d’Alexandrie, Athanase, au cours de divers conciles (Tyr en 335, Antioche en 341) mais il est éventuellement rétablit dans ses fonctions avec le soutiens du pape Jules Ier au concile de Sardique en 342. Finalement, en 346, les deux frères s’entendent sur une politique de non-intervention de l’un sur le territoire de l’autre.
Malheureusement, l’administration de Constans n’est pas très efficace car sa bureaucratie est lourde et corrompue. Et, comme il doit accroître le fardeau fiscal de la population, il n’est pas très populaire. D’autant plus qu’il est accusé d’être cruel, débauché et homosexuel — il aurait fait un édit punissant de mort “l’homme qui épouse un homme comme s’il était une femme” [cum vir nubit in feminam viris porrecturam] mais cela n’était peut-être que pour faire taire les rumeurs à son sujet… Il n’est donc pas surprenant que son entourage (le ministre des finances Marcellinus et des officiers militaires) complote contre lui. Ayant perdu le support des légions, les troupes basées à Augustodunum (Autun) acclament empereur le général Flavius Magnentius en janvier 350. À cette nouvelle, Constans fuit vers l’Espagne mais il est rattrapé à Castrum Helenae (Elne) dans les Pyrénées et assassiné le 27 février 350. Il n’avait que trente ans et son règne n’aura durée qu’une douzaine d’année. Quand à Magnentius, qui s’est adjoint comme César Magnus Decentius (possiblement son frère), il ne règne que trois ans. À la nouvelle de la mort de Constans, Constantius II abandonne le front Perse pour marcher sur l’usurpateur. Après une première confrontation à Mursa en septembre 351, il le défait à Mons Seleucus en juillet 353 et il se donnera la mort à Lugdunum (Lyon) le 11 août 353. Par la suite, Constantius II règnera seul sur l’empire pendant huit ans…
Mes deux autres pièces de monnaie de Constans nous offrent sur le revers un type avec deux victoires et l’intriguante inscription VICTORIAE DD AVGG Q NN…
La première pièce est un assez beau follis réduit / nummus (G [Good], AE4, AE / BI [Bronze / Billon], 13 x 15 mm, 1.574 g, payé environ $6 le 1985/06/16, dont le flan a une importante rognure sur le quart supérieur droit de l’avers; die-axis: ↑↑). L’avers représente un buste de l’empereur portant un diadème à rosettes, drapé et cuirassé à droite, avec l’inscription latine CONSTANS P[IVS] F[FELIX] AVG[VSTVS] (“Constans, Auguste Pieux et Heureux”). Le revers illustre deux Victoires ailées debout face à face, portant chacune une couronne et une palme, avec l’inscription latine VICTORIAE DD[OMINORVM] AVGG[VSTI] Q[VE] NN[OSTRORVM] (les doubles “D”, “G” et “N” dénotent un pluriel et impliquent DVORVM (deux); “[Dédié] aux victoires de nos deux Seigneurs et Augustes”), avec un TRS• en exergue (marque de la deuxième officine [S=Secundus] de l’atelier de Treveris [TR]) et une branche de palmier dressée (épis?) dans le champs, au centre (marque de séquence?).
D’après le RIC (Kent, J.P.C.; Ed. by Sutherland C.H.V. & Carson R.A.G., The Roman Imperial Coinage vol. VIII: The Family Of Constantine I (337-364), London: Spink & Son, 1981, pp. 130-134, 152), cette pièce aurait été frappée par la seconde officine de l’atelier de Treveris (Trèves) vers 347-348 EC.
La seconde pièce est un follis réduit / nummus de qualité passable (Fr [Fair], AE4, AE / BI [Bronze / Billon], 13 mm, 1.530 g, payé environ $6 le 1985/06/16, caractérisé par un fort dépôt de vert-de-gris; die-axis: ↑↑). L’avers représente probablement un buste (tête plus grosse?) de l’empereur portant un diadème à rosettes (?), (drapé et cuirassé ?) à droite, avec l’inscription latine CONSTAN-S P[IVS] F[FELIX] AVG[VSTVS] (“Constans, Auguste Pieux et Heureux”). Le revers illustre deux Victoires ailées debout face à face, portant chacune une couronne et une palme, avec l’inscription latine VICTORIAE DD[OMINORVM] AVGG[VSTI] Q[VE] NN[OSTRORVM] (“[Dédié] aux victoires de nos deux Seigneurs et Augustes”). Malheureusement les détails de l’exergue et du champs demeurent illisibles… Toutefois, comme toutes mes pièces de cet empereurs proviennent du même lot et que la plupart ont été frappé à Trèves, j’aurais tendance à croire que c’est le cas aussi pour cette pièce… Néanmoins pas moins de sept ateliers ont frappé ce type à la même époque: Aquileia (AQP), Arles (PARL), Lyon (PLG), Rome (RP, R•P), Siscia (ASIS), Thessalonica (SMTSA) et Trèves (TRP).
D’après le RIC (op. cit., pp. 130-134, 151-152), cette pièce aurait possiblement été frappée par l’atelier de Treveris (Trèves) vers 347-348 EC. Si statistiquement il y a plus de chance que ce soit une pièce de Constans, j’admet cependant que cela pourrait tout aussi bien être une pièce de Constantius II…
Sources: Wikipedia (Constans [FR/EN]), FAC (Constans, palm, Victoria, VICTORIAE DD NN AVGG, wreath), ERIC (Constans); RIC v. VIII, Trier: 209; online ref. pièce 1: Google, numismatics, WildWinds (text, image). Voir aussi mes fiches (pièce 1, pièce 2).
Ce type de revers avec deux Victoires ne semble pas célébrer une victoire militaire spécifique et récente. Il ne fait, sans doute, que rappeler les victoires antérieures de Constans contre Constantin II et contre les tribus germaniques. Dans un contexte plus large, il commémore possiblement aussi le quinzième anniversaire du règne de Constans et le onzième centenaire de la ville éternelle. Aussi, en invoquant les victoires des deux Augustes, il rappelle la bonne entente entre les co-empereurs. C’est somme toute une autre version de la propagande rassurante de l’Empire.
La semaine prochaine nous abordons le règne du quatrième et dernier fils de Constantinus, Constantius II.
Voir l’index des articles de cette chronique.
[
Translate ]