Littérature pré-républicaine (1)
Introduction
La littérature romaine est née et a évoluée en même temps que la langue latine. À la fondation de la ville, les habitants du Latium sont un peuple agraire, simple, réaliste et pratique. La latin primitif reflétera donc cet état d’esprit en étant une langue simple, concise, précise et un peu rigide, voir monotone, qui n’est en rien comparable à l’élégance et la richesse de la langue grecque à qui elle doit son alphabet (via les étrusques). La littérature latine primitive surgira de deux nécessités pratiques: la prière (carmen) ainsi que le droit.
Ces prières sont en fait des chants. Ce sont des hymnes liturgiques (Carmen Arvale, Carmen Saliare) récités durant des processions et parfois accompagnés de danses. À la même époque, nous retrouvons d’autres types de chants: des chants funèbres (naeniae) célébrant le défunt, des chants panégyrique louangeant une personnalité durant un banquet, des chants satyriques improvisés lors des triomphes pour se moquer du vainqueur, et même des couplets un peu grossiers chantés durant les fêtes publiques. Ces chants sont en vers et sont donc une forme de poésie, tout comme le théâtre, qui est également en vers, ce qui fait que les dramaturges latins sont souvent classés comme poètes. La fabula Atellana est d’ailleurs une forme de théâtre latin primitif, en vers, en partie improvisé, et constitué d’une comédie bouffonne.
Les textes latins écrits les plus anciens, datant des VIIe et VIe siècles, sont des inscription sur des vases (le kernos du Quirinal, le vase de Tita Vendia et le bol du Garigliano) et ont des usages pratiques (propriété de…) ou votives. Similairement, on retrouve par la suite quelques inscriptions lapidaires du VIe ou Ve siècle : la Lapis Niger (dont l’interprétation varie de simple malédiction, à “interdiction de stationner votre attelage en face du sanctuaire”, à marqueur du tombeau de Romulus) et la Lapis Satricanus (dédicace à Mars de Publius Valerius, possiblement l’un des quatre consuls fondateurs de la République).
Toutefois, les textes de latin écrits les plus élaborés de l’époque seront sans aucun doute les textes de lois: des lois religieuses d’abord, puis celles des monarques (leges regiae) et puis, au Ve siècle, la loi des Douze Tables qui, même si elle est inspirée de lois grecques, établie par écrit les bases du droit romain. On retrouve de nombreux exemples épigraphiques de lois, d’édits ou de proclamations — comme le Senatus Consultum de Bacchanalibus qui interdisait en 186 la tenu de bacchanales suite à un scandale.
Tant le chant que la législation amèneront le développement de la rhétorique. Par exemple, le chant funèbre amènera l’oraison funèbre. De plus, les lois doivent être discutées, appliquées et défendues, ce qui développera le discours publique et politique ainsi que la plaidoirie judiciaire. Rome verra naître de nombreux grands orateurs. Aussi, cette propension à compiler les lois et les dates (Fastes) dans des listes conduira à la création des annales, qui rapportent simplement les événements chronologiquement, et éventuellement à l’histoire, qui contextualise et interprète l’événement.
La littérature pré-républicaine (ou littérature républicaine archaïque) débute avec la fin de l’époque royale et s’exprime durant les IIIe et IIe siècle AEC. Elle est écrite en latin archaïque. C’est à cette époque que l’influence grecque se fait vraiment sentir, d’abord durant l’expansion italienne par les contacts avec les colonies grecques du sud de l’Italie, puis durant les guerres puniques et, finalement, avec la conquête de la Grèce, durant les guerres macédoniennes.
La littérature romaine cherche alors à imiter la littérature grecque, notamment dans le théâtre. On traduit, imite (fabula cothurnata) ou transpose (fabula prætexta) les pièces grecques en latin. Toutefois, si le genre dominant en Grèce était la tragédie, c’est surtout la comédie qui se développera à Rome en prenant des caractéristiques bien romaines (ou italiques, s’inspirant peut-être de la fabula Atellana). On en retrouve deux types: la fabula palliata, qui imite des pièces grecques de la nouvelle comédie et où les acteurs portent le manteau grec (pallium), et la fabula togata, qui prends place en Italie avec des scènes de la vie romaine et où les acteurs portent la toge romaine (toga).
La poésie se développe également dans un genre typiquement romain: la satire. La prose littéraire fait également son apparition surtout dans les domaines de la rhétorique (qui deviendra un genre littéraire très romain), de l’histoire (avec les écrits de très nombreux annalistes) et du traité érudit ou scientifique (en agriculture, en droit, en philologie, etc.). Malheureusement, très peu de textes de cette période nous ont été conservé et généralement seulement par de très brefs fragments cités par des auteurs postérieurs.
Dans la littérature républicaine archaïque on retrouve une quarantaine d’auteurs, dont seulement quatre sont vraiment importants: Plaute, Caton, Polybe et Térence. Ils sont sans doute encore bien connu de nos jours du fait qu’une partie substantielle de leurs oeuvres nous ait été préservée — à moins, bien sûr, que leurs oeuvres aient été conservées justement à cause de l’importance qu’elles avaient aux yeux de leur contemporains et de leurs successeurs.
Dans la prochaine partie de cet article, je vous présenterai chacun de ces auteurs, par ordre chronologique, et en de brève notice biographiques. J’ai fait ici un grand effort de synthèse (sans jamais recourir à l’ “intelligence artificielle”), mais ce n’est pas toujours aisé puisque mes sources sont un peu vieilles et que les différentes versions de Wikipedia (e.g. française, anglaise, italienne, allemande, russe, etc.) sont parfois contradictoires mais se complètent généralement bien.
Prochainement: La Littérature pré-républicaine (2): Le IIIe siècle AEC.
Rérérences:
- Bayet, Jean. Littérature latine: histoires et pages choisies. Paris: Armand Colin, 1960. 796 p. [Goodreads]
- Bender, Hermann. Histoire abrégée de la littérature romaine. Paris: C. Klincksieck, 1885. 178 p. [Goodreads]
- Grimal, Pierre. La civilisation romaine. Paris: Flammarion, 1981. 374 p. [Goodreads]
- Laurend, Louis. Manuel des Études Grecques et Latines, Fascicule V: Littérature latine. Paris: Auguste Picard, 1923. 148 p. [Goodreads]
- Wikipedia: Histoire de la littérature latine, Littérature latine, Latin archaïque, et de nombreuses pages de références (auteurs, genres, etc.).
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